Les verdures en Aubusson

Histoire des verdures à Aubusson

Histoire

Des mille fleurs aux feuilles d'aristoloches

Les premières mentions historiques au XVe siècle renvoient à des tapisseries à "larges bandes de couleurs et menus feuillages". Les premières tapisseries murales tissées dans la Marche (région d’Aubusson - Felletin) étaient des "mille fleurs", où telles des enluminures géantes, un herbier méthodique et coloré est tissé sur l’entière surface du textile.

Durant le XVIe siècle, les "verdures à feuilles de choux et bestiaire fantastique", adaptent à Aubusson un genre venu des Flandres : de larges feuilles abritent des combats d’animaux et hébergent une faune fantastique tirée des bestiaires médiévaux. Les enroulements végétaux créent une ambiance de nature foisonnante, imaginaire et pour autant émaillée de détails naturalistes : si ces "feuilles de choux", dites aussi "feuilles d’aristoloches" ne renvoient à aucune plante identifiable (plutôt à une forme ronde de la feuille d’acanthe), le premier plan des tapisseries fourmillent de petits détails : osiers émondés, reconnaissables à leur forme d’arbre "en trogne" ou "têtard", châtaigniers en fleurs, chênes dont les feuilles sont parfaitement reproduites... Une exceptionnelle suite de 10 pièces de ces tapisseries des années 1580 est conservée à Anglards-de-Salers dans le Cantal.

Les grands cycles iconographiques

Progressant vers son apogée en tissant de larges tentures de 6 à 8, parfois 12 tapisseries assorties, les grands cycles iconographiques, littéraires ou mythologiques du XVIIe siècle, utilisent des fonds de verdures pour accueillir en leur sein les aventures amoureuses de Renaud et Armide, les batailles de la guerre de Troie, les scènes pastorales de l’Aminte ou de l’Astrée.

Le XVIIIe siècle, âge d'or des verdures d'Aubusson

Durant le XVIIIe siècle, le sujet de la verdure s’impose comme objet unique de tissage. Plus on avance dans le siècle des Lumières, plus le motif de l’arbre devient objet de tapisseries, à tel point que ce sont de véritables "portraits d’arbres" à fleurs ou à fruits multicolores qui deviennent prétexte à de larges tableaux tissés, parfois créés par des artistes tels Jean-Baptiste Oudry. Le goût des turqueries et chinoiseries engendre de plantureux tissages de palmiers au sein des différentes verdures exotiques ou autres tentures chinoises inspirées de l’oeuvre de François Boucher.

5 siècles de verdures... et aujourd'hui?

Durant 5 siècles et demi d’histoire, le monde végétal est associé à la tapisserie, dans les tapis Napoléon III, dans l’alphabet décoratif de Jean Lurçat ou les recherches techniques menées par l’École Nationale d’Arts Décoratifs d’Aubusson pour rénover la tapisserie et l’ouvrir au modernisme des années 1920.

Aujourd’hui encore, dans ses expressions les plus contemporaines, feuilles, arbres, structurent les compositions, tel l’étrange arbre central du paysage paradoxal d’Olivier Nottellet, 3e Prix 2010 de la Cité de la tapisserie, ou la peau mi-végétale/mi-animale de l’étonnante sculpture Le Bain de Christophe Marchalot et Félicia Fortuna, Mention spéciale de l'appel à création 2012.

Les verdures d'Aubusson marquent une appropriation du végétal, fixé dans la laine pour échapper à la marche des saisons et emplir l’intérieur d’un jardin en permanente floraison, une immersion chaleureuse dans un cocon aux histoires enchantées...

C'est en se fondant sur cette longue histoire que la Cité de la tapisserie a lancé son appel à création contemporaine 2013 sur le thème "Les nouvelles verdures d'Aubusson".