La manufacture Croc-Jorrand
La manufacture Croc-Jorrand a été fondée dans les années 1820-1830 par Pierre Croc à Aubusson, à la confluence de la Creuse et de la Beauze.
Le site a ensuite été repris plusieurs fois avant de devenir aujourd'hui la MEFAA (Maison de l'Emploi et de la Formation de l'Arrondissement d'Aubusson).
Pierre Croc se lance dans la fabrication de tapisseries de basse-lisse, son fils s'associe ensuite à lui. À sa mort en 1868, c'est son gendre Adolphe Martial Jorrand qui prend la direction de l'entreprise. Il est lui-même rejoint par ses fils à partir des années 1890, Louis étant chargé de la gestion, Antoine de la partie artistique. Ce dernier, par sa fourniture de cartons, que ce soit à Aubusson ou aux Gobelins, est d'ailleurs considéré comme l'un des précurseurs de la rénovation de la tapisserie dès 1900. Il se tourne vers la tapisserie médiévale, tant pour ses caractéristiques plastiques que pour son écriture technique. On lui doit La Fée des Bois, créée en 1907.
Les membres de cette grande famille de tapissiers sont influents à Aubusson, où ils occupent différentes fonctions aussi bien dans le conseil municipal, au conseil des Prudhommes ou à la Chambre consultative des Artset Manufactures de la ville.
La manufacture Croc-Jorrand est une des deux grandes entreprises qui se tournent très tôt vers la production de tapis mécaniques à l'aide de métiers Jacquart à côté de la production de tapisserie de basse-lisse. Ainsi, la production de la manufacture estimée à 30 000 francs vers 1830, dépasse le million en 1878, employant alors plus de 450 ouvriers. De nombreuses médailles viennent récompenser ce travail, notamment une médaille d'argent à l'Exposition Universelle de Paris de 1867. Vers 1900, elle emploie encore près de 300 ouvriers au moment où elle est à nouveau récompensée d'un grand prix à l'Exposition universelle de Paris.
Après la Première Guerre mondiale, face aux difficultés, les établissements Croc-Jorrand fusionnent avec la manufacture Danton pour former une seule entité dont la raison sociale est "Aux Fabriques d'Aubusson". Cette société, dont le siège social est à Paris, au 13 rue Lafayette, a un capital de 4 à 5 millions de francs. Elle émet à ce moment-là plusieurs séries d'actions et emploie encore quelques 235 ouvriers. Elle réalise de prestigieuses œuvres pour l'Exposition internationale des Arts décoratifs de 1925, notamment pour le pavillon "Une ambassade française" avec un somptueux tapis d'après Édouard Benedictus.
Malheureusement victime de la crise économique qui frappe l'Europe et le monde au début des années 1930, elle fait faillite en 1932.