En raison de la venue d'un très grand nombre de groupes, les visites guidées de 11h et 15h sont annulées le samedi 26 août 2017.
Rendez-vous dès le dimanche 27 pour profiter des visites guidées gratuites, à 11h et 15h.
Comme en témoigne encore aujourd’hui le patrimoine architectural subsistant, les Sallandrouze font partie des familles les plus illustres dans l’industrie des tapis, de la moquette et de la tapisserie à Aubusson. Toutefois, nous devons distinguer les deux branches de la famille connue sous le nom des Sallandrouze : d’une part, les Sallandrouze de Lamornaix, actifs du début du XIXe siècle jusqu’aux années 1870, et d’autre part les Sallandrouze Lemoullec, dont l’activité s’exerce du milieu du XIXe siècle jusqu’aux années 1990.
Sallandrouze de Lamornaix
Jean Sallandrouze de Lamornaix est le premier membre de la famille à connaître un succès conséquent dans l’industrie du tapis et de la tapisserie. Ainsi, dès la première exposition nationale des produits de l’industrie à Paris en 1802, l’entreprise Rogier et Sallandrouze, née de l’association entre Jean Sallandrouze de Lamornaix et le maire d’Aubusson Guillaume Rogier, est récompensée. En plus de sa manufacture alors située sur l’actuel emplacement de la manufacture Saint-Jean à Aubusson, Jean Sallandrouze de Lamornaix ouvre une manufacture de tapis velours dans le quartier du Marais, à Paris. Son fils, Charles Sallandrouze de Lamornaix, prend ensuite la succession de l’entreprise à partir de 1826 et devient un industriel important au XIXe siècle. En parallèle des ateliers à Aubusson, il acquiert l’hôtel Montholon à Paris pour y installer une boutique dans le nouveau quartier à la mode des Grands Boulevards. Charles Sallandrouze de Lamornaix est aussi impliqué dans la politique et est élu conseiller général de la Creuse à partir de 1841, député à plusieurs reprises à partir de 1846, et enfin maire d’Aubusson. Il publie également plusieurs ouvrages dont les Considérations sur la législation des brevets d’invention, en 1829. Charles Sallandrouze de Lamornaix participe activement aux expositions universelles du XIXe siècle. À cet effet, en 1851 à Londres, il est commissaire général et, à ce titre, responsable de la direction française de l’exposition par délégation. En 1855, il est vice-président du jury à l’exposition universelle parisienne.
À la mort de Charles Sallandrouze de Lamornaix, le fils du fabricant, Octave Sallandrouze de Lamornaix prend la succession de l’entreprise. Ses tapis et tapisseries rencontrent également un vif succès à l’exposition universelle de 1867. Après la défaite de la France face à la Prusse en 1870, dans un contexte de crise économique, l’usine Sallandrouze de Lamornaix ferme en 1872. Ses bâtiments sont rachetés par la famille Hamot, qui y développe une prestigieuse manufacture de tapis et tapisseries qui deviendra plus tard la Manufacture Saint-Jean.
Sallandrouze Lemoullec
Dans la branche cadette de la famille des Sallandrouze, nous trouvons le cousin de Charles Sallandrouze de Lamornaix, Alexis Sallandrouze. Celui-ci est connu pour la célèbre Tapisserie à l’éléphant, actuellement conservée au musée du Louvre. Un autre cousin de Charles Sallandrouze de Lamornaix, Jean-Jacques Sallandrouze Lemoullec, connaît un succès retentissant dans l’entreprise qu’il avait créée avec Charles Sallandrouze. Ils remportent ainsi des médailles d’argent aux expositions universelles de 1855 et de 1867 sous le nom de Sallandrouze Jean-Jacques et Charles, puis de Jean-Jacques Sallandrouze père et fils. Ils industrialisent la production de tapis mécaniques et de moquettes, grâce à l’installation de métiers à vapeur alimentés par l’eau de la Creuse. Les ateliers de production, installés dans un premier temps à Felletin, sont déplacés à Aubusson. L’entreprise qui prend ensuite le nom de Sallandrouze frères, remporte de grandes médailles aux expositions universelles de 1878 et de 1889. Elle fait construire un imposant bâtiment en L pour abriter les moulins hydrauliques Mirabeau utilisés pour la filature à Felletin. Sallandrouze frères localisent ensuite la totalité de leur production à Aubusson, dans la nouvelle usine construite en 1885 dans le quartier Saint-Jean. L’entreprise, qui emploie 800 ouvriers à la fin du XIXe siècle, produit des tapis et des moquettes uniquement sur des métiers mécaniques.
Au XXe siècle, l’usine est alimentée par l’énergie provenant de la centrale hydro-électrique de la Croix Blanche et du barrage des Combes*. À partir des années 1920, d’exceptionnels sheds en béton à toitures courbes sont construits par la société fondée par l’ingénieur béton armé François Hennebique, véritable précurseur de l’architecture béton. L’entreprise est ensuite partiellement détruite pendant la Seconde Guerre mondiale, en juillet 1944, avant d’être reconstruite dans une architecture en sheds également. L’entreprise Sallandrouze frères cesse son activité dans les années 1990 et devient Manufacture Royale du Parc. Les bâtiments de l’usine sont entièrement détruits et rasés en 2014. Le château Sallandrouze, transformé pendant quelques années en hôtel de luxe, le château Saint-Jean qui abrite actuellement la maison de retraite d’Aubusson et la villa Saint-Jean, dans laquelle sont installés des locaux d’EDF-GDF, témoignent encore aujourd’hui de la richesse et de l’importance de la famille Sallandrouze dans la ville d’Aubusson aux XIXe et XXe siècles.
L’entreprise Manufacture Royale du Parc continue pour sa part son activité dans des locaux situés dans le quartier de la Beauze et produit des tapis et moquettes sur mesure pour les établissements hôteliers les plus luxueux, les compagnies de transports aériens et ferrovières.
D’après Juliette Ronsin
* L’exposition « Énergie et bâtisseurs », organisée par l’association Les Maçons de la Creuse, célèbre le centenaire de la construction du barrage des Combes, à Felletin, du 14 juillet au 30 septembre 2017. Pour en savoir plus, découvrez le site de l’association Les Maçons de la Creuse.
Au-delà du musée traditionnel, la Cité de la tapisserie se donne pour mission de soutenir la filière et œuvre au développement économique du territoire. En mettant à leur disposition deux ateliers de 31m2, la Cité accueille des porteurs de projets textiles innovants, dans le cadre d’un partenariat avec la Pépinière 2Cube d’Aubusson. Lyse Drouaine est l’une des créatrices sélectionnées pour développer son activité au sein de la Cité.
Deux projets de création d’entreprise ont été retenus pour intégrer les Ateliers de la Cité. Après Laurine Malengreau avec « OOLMOO : new textile art from Aubusson », c’est au tour de la designer textile Lyse Drouaine de prendre possession de son local.
De la tradition à l’innovation textile, le projet de Lyse Drouaine s’est construit au fil de sa formation et de ses différentes expériences professionnelles en création textile.
Après un Diplôme des Métiers d’Art en Textile à l’École supérieure des arts appliqués Duperré (Paris), pour lequel elle se spécialise en tissage, la jeune femme poursuit ses études textiles en licence professionnelle Design de Mode, Textile et Environnement. Pendant ses années de formation, Lyse Drouaine s’intéresse particulièrement à la lumière, qui prend forme dans la matière tissée et se propage dans l’espace architectural.
Grâce à un stage auprès d’un équipementier automobile, elle découvre le tissage industriel et les métiers jacquard et développe ensuite une collection de textiles pour l’automobile. Le style épuré laisse apparaître un motif récurent : celui de la ligne interrompue.
Puis, assistante de création aux ateliers Sophie Mallebranche, elle s’imprègne des codes du secteur du luxe, sur un poste polyvalent qui lui laisse découvrir les différentes facettes du métier de directeur artistique.
La créatrice part ensuite au Vietnam dans le cadre d’un programme mené par l’association Batik International. Elle y développe pendant six mois des collections de tissage manuel au sein d’une entreprise de Hanoi. Une expérience qui lui permet de côtoyer les sériciculteurs, les filatures, les artisans auprès desquels elle découvre les propriétés et la production de matières nobles.
De retour en France, c’est sous de nouvelles influences qu’elle renouvelle et précise son travail autour des textiles lumineux. Elle allie désormais la fibre optique aux matières naturelles, à la recherche d’un équilibre subtil entre matière et lumière.
À la recherche d’un lieu propice aux échanges et au développement de cette nouvelle activité, elle propose un dossier de candidature pour intégrer l’un des Ateliers de la Cité et voit son projet sélectionné.
Son premier objectif est de développer une collection de panneaux tissés avec du lin, dont elle souligne les qualités techniques autant que sa façon de s’intégrer à une architecture, en le combinant à un léger réseau de fibre optique. Les matières s’apprécient avec et sans éclairage, fonctionnent de jour comme de nuit. Tantôt réalisés à la main sur un métier à échantillonner installé dans son atelier au deuxième étage de la Cité de la tapisserie, tantôt produits en collaboration avec des industriels, les prototypes se succèdent.
Le travail de recherche de Lyse Drouaine a été sélectionné par la Cité du design dans le cadre du Off de la Biennale Internationale du Design 2017 de Saint-Étienne. Intitulée « Tisseuse de Lumière », une exposition construite autour de ce projet de design textile sera accessible au public aux Ateliers Weiss à Saint-Étienne, du 06 mars au 31 août 2017.
Sébastien Gouju, Salades, mention spéciale du jury, 2016. Maquette conservée par la Cité internationale de la tapisserie.
Travaillant sur la question du lien et de la hiérarchie entre "arts nobles" et "arts mineurs", Sébastien Gouju revisite les verdures traditionnelles de la tapisserie d'Aubusson de manière humoristique. Partant de la notion de décor, il s'est inspiré de ce qui décore nos assiettes, pour nous plonger dans le sachet de salade. Il livre une composition de salades, une salade composée, dans la version la plus calibrée, la plus industrielle qui soit, avec un traitement très contrasté et graphique.
Imprégné des contraintes du médium textile, Sébastien Gouju a souhaité restreindre son carton à 20 couleurs et jouer sur l'écriture technique de la tapisserie pour transcrire le bouillonnement quasi organique de sa composition dans un projet de tissage maîtrisé. Le jury a tenu à souligner la qualité de son projet en lui attribuant la mention spéciale 2016.
Grand Prix 2016
Création – Eva Nielsen, artiste née en 1983, franco-danoise, vit et travaille en France (Paris).
Tissage – Atelier Patrick Guillot, Aubusson, 2018
Tapisserie de basse lisse, chaîne coton, trame en laine et soie, 7,5 fils de chaine au cm
Dimensions 3m ht x 2,20 m l
Teinture : Thierry Roger, Aubusson
Eva Nielsen est une artiste peintre créatrice d’ailleurs singuliers, de paysages vivants par le prisme de monuments, de portiques, d’éléments architecturaux, de voilages. Le temps y est stationnaire dans le présent, mais tout autant dans le passé et le futur, avec une étrange présence documentaire où le caractère photographique et pictural se lient, brouillant les frontières et les espaces tout en conservant la précision d’une réalité archéologique. Ses tableaux s’ouvrent sur une profondeur de plans, la présence des objets dans l’espace-temps y est accentuée.
Ce caractère surréaliste autant qu’hyper réaliste se retrouve dans la tapisserie interpellant le regardeur dans ses matières et ses points, confrontant un premier plan et un lointain, à la fois précis et interprétables. La tapisserie Lucite est une transcription textile d’une œuvre où l’artiste a superposé l’impression d’une moustiquaire à la photographie d’un paysage. La texture et les points de tissage sont eux-mêmes un traitement du voilage qui devient ici un nouveau filtre subjectif du paysage. Le titre Lucite fait référence à la maladie du même nom, interdisant la confrontation directe à la lumière et nécessitant la protection de la peau par un voilage.
2e prix – Appel à création 2016
Création – Marie Sirgue, artiste née en 1985, vit et travaille en France (Paris).
Tissage – Atelier A2, Aubusson
Tapisserie de basse lisse, chaîne coton, trame en laine
Dimensions 3m ht x 2m l
Teinture : Thierry Roger, Aubusson
L’artiste Marie Sirgue joue sur des détournements d’objets, des trompe-l’œil utilisant des matériaux en décalage, conférant une nouvelle identité et un ennoblissement d’autant plus grand à l’objet de référence que celui-ci est banal, pauvre, parfois désuet. Ses installations déployées dans des espaces urbains, des architectures, des intérieurs, provoquent une confrontation entre ce qui nous est connu et l’insolite. Des évocations formelles cohérentes rejoignent l’impossible.
Le caractère utilitaire de l’objet du quotidien est remplacé par la poésie, l’imaginaire, l’inattendu. L’artiste utilise les savoir-faire pour mettre en valeur le banal et parfois même inverse le processus en se servant du pauvre pour banaliser le précieux. Ici, elle a choisi de traduire en tapisserie une bâche plastique bleue. De loin, l’œil est dupé puis en s’approchant les références se brouillent, l’œuvre prend un caractère pictural proche de la peinture pour devenir de plus près une œuvre tissée dans sa pleine sa nature. La tapisserie n’est pas une copie de la bâche mais une interprétation dans laquelle toutes les formes d’abstraction participent à réinventer le modèle sans pour autant le trahir.